Une nouvelle atmosphère de guerre froide est en train d’émerger, et une étude sur la croissance des ports britanniques en Afrique pourrait donner un aperçu des relations internationales.
L’un des principaux sujets de discussion à l’approche de la réunion du Forum sur la coopération sino-africaine (FOCAC) est de savoir si la Chine abandonne les projets d’infrastructure à grande échelle tels que les routes et les ports.
Il était donc particulièrement intrigant de voir cette semaine l’annonce d’un nouvel investissement majeur dans les ports africains par… le Royaume-Uni. L’organisme d’investissement pour le développement du pays, CDC Group, a annoncé le plus gros investissement dans les infrastructures portuaires en Afrique depuis sa création il y a 73 ans. Son premier investissement de 320 millions de dollars soutiendra l’expansion de trois ports : Dakar, au Sénégal (où se tiendra également le FOCAC), Sokhna, sur la côte égyptienne de la mer Rouge, et Berbera, au Somaliland. Un autre montant de 400 millions de dollars sera investi dans de futurs ports secs et activités logistiques.
Les spécificités de la coentreprise sont intéressantes. L’investissement du groupe CDC sera renforcé par un investissement d’un milliard de dollars de Dubai Ports World (DPW). Ceux qui suivent depuis longtemps les liens entre l’Afrique et la Chine se souviendront de la lutte juridique que DPW continue de mener avec le gouvernement djiboutien.
DPW réclame 210 millions de dollars de dommages et intérêts après que Djibouti a renoncé à la propriété du terminal à conteneurs de Doraleh au profit de China Merchants Ports Holdings. Le conflit a éclaté peu après l’établissement de la première base navale chinoise à l’étranger, qui a été construite à proximité immédiate de Doraleh. Cet événement, ainsi que le développement financé par la Chine de Doraleh, qui est passé d’un port commercial à un port polyvalent capable d’accueillir des bateaux militaires, a suscité la colère de l’armée américaine, dont le Camp Lemonnier se trouve à quelques kilomètres seulement.
DPW a porté son combat devant la Cour d’arbitrage international de Londres, qui lui a donné gain de cause, ce que les autorités djiboutiennes ont rapidement rejeté. L’affaire judiciaire est en cours, mais le port de Djibouti n’est pas affecté. Même lorsque l’épidémie a paralysé le transport maritime mondial, il a vu son trafic augmenter de 30 % en 2020.
Les marchandises provenant des centres de production enclavés de l’Éthiopie voisine représentent une part importante de cette industrie, et l’investissement de DPW à Berbera dans le Somaliland voisin vise directement la part de Djibouti. La participation de l’Éthiopie dans ce domaine n’est pas seulement commerciale. Elle est depuis longtemps un partisan du Somaliland, et elle était un partenaire minoritaire dans un précédent projet d’expansion avec DPW et le gouvernement du Somaliland. Craignant l’hégémonie de l’Éthiopie, l’Égypte a lutté pour l’indépendance du Somaliland, ce qui rend intéressante l’inclusion du projet Sokhna dans la nouvelle coentreprise entre DPW et le groupe britannique CDC.
Le cas fascinant du Somaliland
Les flirts continus du Somaliland avec Taïwan, qui a récemment construit un bureau de représentation à Hargeisa, sont encore plus fascinants. La Somalie, qui s’oppose à l’indépendance du Somaliland, a réagi avec colère. Elle a également poussé le porte-parole officiel chinois, Zhao Lijian, à passer en mode biblique, menaçant ceux qui désobéissent au principe d’une seule Chine « d’être brûlés et de consommer le fruit amer ».
Le choix du groupe CDC d’investir au Somaliland n’est donc pas seulement motivé par le désir de DPW de s’en prendre à Djibouti. Il bénéficie également d’un soutien puissant dans notre nouvel environnement de guerre froide.
En ce qui concerne la participation du Royaume-Uni, il convient de noter que cette déclaration a eu lieu la même semaine où le président français Emmanuel Macron a patiemment répondu aux questions de jeunes Africains sur l’histoire coloniale de la France. En effet, à l’époque où le Somaliland était un protectorat britannique, le groupe CDC était connu sous son nom complet – la Colonial Development Corporation.